Vous lisez : Les régimes de retraite : bombe à retardement ou enjeu de société? (1 de 2)

Note : Ce texte est le premier de deux articles consacrés aux régimes de retraite. Il présente les problèmes créés par les régimes actuels. L’article suivant abordera la question des choix et des solutions envisageables. 

Depuis quelques semaines, les milieux médiatiques portent un intérêt accru à l’épineuse question des régimes de retraite. Ce qui pose problème, c’est l’incapacité de ces régimes de répondre aux enjeux socioéconomiques actuels. D’ailleurs, qu’est-ce qui achoppe actuellement dans le renouvellement des négociations des conventions collectives? Quel sera le principal enjeu à venir en relations du travail? Les salaires? Rarement. Les congés? Parfois. La sécurité d’emploi? Un peu moins en raison du faible taux de chômage. Le principal enjeu, ce seront les régimes de retraite. 

1. Des signes avant-coureurs

Même si le réveil est brutal, force est d’admettre que les symptômes de la crise ne datent pas d’hier. Faut-il rappeler que la majorité des contrats de régimes complémentaires de retraite ont été conclus au cours des années 1960, alors que très peu de personnes se retiraient avant 65 ans et que l’espérance de vie atteignait à peine 70 ans? Mais aujourd’hui, les déficits actuariels s’accumulent à la vitesse grand V. En effet, les responsables ont préféré garder la tête dans le sable dans l’espoir non avoué de refiler le problème aux futures générations. Réglons pour l’instant et on verra plus tard... Voici les facteurs qui sont à l’origine de la situation actuelle. 

Évolution démographique
Plusieurs des régimes actuels remontent bel et bien à une autre époque, alors que les personnes travaillaient au moins jusqu’à 65 ans et mouraient à peine quelques années plus tard. Donc, une période de cotisation étendue et une période de prestation restreinte. 

Rendement des placements
Au cours des dernières années, les marchés financiers ont été affectés par des fluctuations importantes et parfois catastrophiques (dot.com en 2000 et récession en 2008) ainsi que des rendements obligataires moroses. 

Rigidité des régimes en place
Coulés dans le béton depuis quelques décennies, les « contrats » de régimes de retraite ont eu peine à s’adapter aux aléas de la conjoncture économique et démographique. Résultat, un outil déphasé par rapport à son environnement et déconnecté des réalités contemporaines. 

Revendications syndicales... et congés de cotisation
Au cours des années, surtout lors des périodes de vaches grasses, les syndicats sont parvenus à bonifier habilement les modalités de ces régimes à l’avantage de leurs membres. Parallèlement, au cours de ces mêmes périodes, les employeurs se sont permis certaines libertés en profitant des « congés de cotisation », même si cette tendance s’est fortement atténuée depuis cinq ou huit ans.  

Indifférence des jeunes générations
Peu de jeunes, notamment ceux de la génération Y, se soucient de leur retraite. Le quotidien et le court terme accaparent leurs préoccupations. Donc, les questions de retraite sont reléguées aux oubliettes et échappent totalement à leurs préoccupations. Pourrait-on alors concevoir que les vieux ont su en profiter en s’octroyant des privilèges et en leur refilant la facture? 

2. Les enjeux en présence

Précisons d’abord qu’il existe couramment deux types de régimes complémentaires de retraite : les régimes à prestations déterminées (PD) qui garantissent un revenu fixe ou indexé aux retraités et les régimes à cotisations déterminées (CD) dont les rentes sont tributaires des rendements sur les placements. On retrouve les premiers surtout dans le secteur public et parapublic (fonction publique, éducation, santé ou municipalités). Le secteur privé préfère évidemment le second type de régime et plusieurs employeurs assujettis au premier type souhaitent « migrer » vers le second. Précisons que plusieurs fonds de retraite à prestations déterminées sont sous-capitalisés et se retrouvent en situation d’insolvabilité. 

Dans le premier cas, l’employeur est tenu de verser les prestations sans égard aux rendements et il doit combler tout déficit actuariel, peu importe les circonstances. Il peut cependant se permettre de prendre un congé de cotisations lorsque les rendements sont plus performants, mais dans le cas contraire, il doit tout de même passer à la caisse! Les régimes à cotisations déterminées s’apparentent davantage à un REER, de sorte que le montant des rentes fluctue en fonction des marchés financiers. D’ailleurs, nombre de PME proposent un REER collectif à leurs salariés en guise de régime de retraite. 

Tout cela soulève au moins deux problèmes d’envergure :  

  • les prestations augmentent rapidement alors que la capacité de financement des régimes s’amenuise en raison des facteurs démographiques et des rendements financiers déficients (érosion du rapport cotisants/prestataires); 
  • le déficit ainsi créé risque fort d’hypothéquer sérieusement la sécurité de revenus des futures générations, qui auront peut-être une espérance de vie de 100 ans. 

Plus les années avancent, plus l’heure H approche, compte tenu du vieillissement des populations. Dans un tel contexte, de façon à assurer aux citoyens une retraite sereine et sécuritaire, dans quelle mesure serait-il opportun de recourir aux régimes publics plutôt qu’à l’épargne individuelle? L’avenir le dira! 

À propos de l’auteur

Yvan Dubuc, CRHA possède plus de trente-cinq années d’expérience en gestion des ressources humaines et en développement organisationnel à titre de gestionnaire, de formateur ou de consultant pour le compte d’entreprises privées et publiques. Auteur prolifique, il rédige actuellement un ouvrage portant sur le retour au travail des personnes retraitées. On peut le joindre par téléphone [418 522-8052] ou courriel [horizon.27@sympatico.ca].

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