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McKesson Canada : des valeurs d’engagement au cœur de la stratégie d’affaires

Dès l’entrée, les valeurs de McKesson Canada sont affichées haut et fort : intégrité, client d’abord, responsabilité, respect et excellence. Et pas seulement à la réception. Sur tous les murs ou presque.

Même l’énergie qui passe entre les employés ou entre ceux-ci et les visiteurs exprime ces valeurs. En fait, les valeurs d’engagement semblent imprégner la culture de l’entreprise, chef de file en matière de logistique et de distribution dans le secteur des soins de santé. Plus intéressant encore, ces valeurs s’inscrivent au cœur même de la stratégie d’affaires!

6 avril 2011

C’est d’ailleurs cette culture à l’ADN si particulier qui a incité Domenic Pilla à se joindre à McKesson Canada. De même pour Geneviève Fortier, CRHA, vice-présidente, ressources humaines, communications corporatives, sécurité et Six Sigma. Le duo, dont la complicité était palpable au moment de l’entrevue, raconte le virage majeur en gestion des ressources humaines amorcé en 2007, après la nomination de monsieur Pilla à la présidence et l’arrivée de madame Fortier : « Lors d’une rencontre au siège social des États-Unis, la réaction du grand patron de McKesson Corporation nous a ouvert les yeux. Alors que nous étions tout fiers de présenter nos excellents résultats d’affaires, il nous a indiqué que nous devions aussi améliorer la performance en matière d’engagement chez nos trois mille employés. »

Un virage audacieux et innovateur
L’une des initiatives porteuses : confier à Geneviève Fortier plusieurs chapeaux, soit la gestion des ressources humaines, les communications, l’amélioration continue et la sécurité ; il s’agissait ainsi de faire tomber les cloisons, d’améliorer les processus, de favoriser le travail d’équipe et d’adopter une vision et une stratégie innovatrices en matière de gestion des ressources humaines. On a alors investi davantage dans ce domaine, décision qu’il a fallu vendre à l’interne, confie Domenic Pilla : « Alors que nous demandions à tous de faire plus avec moins, nous proposions au contraire d’augmenter les effectifs du service des ressources humaines et d’investir dans de nouveaux programmes. Mais nous avions confiance en cette stratégie et nos gens ont suivi. Ils étaient prêts pour ce changement. »

Ce tournant s’est avéré fort positif. À preuve, le soutien démontré lors d’une grève récente dans un des centres de distribution. Tout le monde a mis l’épaule à la roue. Plus de cent volontaires sont allés travailler sur place pendant deux mois et demi. Ainsi, en quelques jours, le niveau de service était revenu à la normale et la grande majorité des clients a été impressionnée du peu de dérangement occasionné par la grève. N’est-ce pas là une belle preuve de la philosophie d’engagement?

Sans doute que cet audacieux pari a bénéficié du flair et du dynamisme de Geneviève Fortier, maintes fois reconnus par ses pairs. Ainsi, l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés lui remettait en 2006 le prix Mérite du Conseil interprofessionnel du Québec pour sa contribution au développement et à l’essor de la profession au Québec, entre autres par son passage remarqué à titre de présidente de l’Ordre de 2001 à 2004, puis du Conseil canadien des associations en ressources humaines.

Depuis, McKesson Canada prend continuellement le pouls des troupes par un sondage annuel, indique-t-elle : « Cela nous permet de mieux comprendre les éléments qui contribuent à créer et à maintenir un excellent climat de travail. Mesurer le résultat de nos actions est très important, pas seulement les activités réalisées. Agir en partenariat avec les employés sur les éléments à améliorer est d’ailleurs au cœur de cette démarche. »

Se remettre en question pour s’adapter au changement
McKesson Canada fait preuve d’innovation et n’hésite pas à se remettre en question pour obtenir les résultats escomptés. Par exemple, on tente de raffermir l’esprit de collaboration des employés en les faisant évoluer dans de nombreux projets de collaboration interdépartementaux, que ce soit les opérations, les achats, la logistique ou d’autres fonctions d’appui. Ils obtiennent ainsi une vue d’ensemble, ce à quoi tient beaucoup le président. Pendant l’entrevue, il emploie souvent le mot « levier » pour illustrer l’importance d’orchestrer les différentes tendances et forces en présence.

La responsabilité de la haute direction, c’est aussi d’être à l’affût des mouvances dans l’environnement des clients afin d’en prévoir l’impact sur les solutions offertes et d’améliorer les futurs services. Ainsi, les clients de McKesson Canada (hôpitaux, cliniques, pharmacies, gouvernements ou fabricants de médicaments) évoluent dans le secteur de la santé et sont appelés à vivre de profondes transformations. « Le vieillissement de la population crée de nouveaux besoins. Les infrastructures actuelles ne pouvant suivre, les soins à domicile prendront de l’ampleur. Aussi, les produits sont de plus en plus spécialisés et les patients, de plus en plus avertis. Avec l’avènement d’Internet, ils en savent davantage et ils questionnent donc plus. Nous devons adapter nos services à cette nouvelle réalité », croit Domenic Pilla. Ajoutons à cela les exigences de la génération Y qui cherche à comprendre le plan de traitement et à discuter avec le médecin, tout en glanant de l’information via les médias sociaux. Une raison de plus pour ne rien tenir pour acquis et pour chercher à s’adapter continuellement.

Le défi : traduire la culture dans les pratiques de gestion
Une culture d’entreprise se bâtit au jour le jour. Pour trouver l’équilibre, il faut jongler constamment et faire évoluer les pratiques. Ainsi, si les programmes sont trop structurés, ils peuvent être trop rigides. On doit donc adopter la stratégie des petits pas, afin d’évaluer et d’anticiper les répercussions possibles, indique Domenic Pilla : « Par exemple, la gestion de la performance. Devrait-on saluer les talents individuels ou plutôt reconnaître l’esprit d’équipe? Quels messages nos programmes de gestion des ressources humaines communiquent-ils à cet effet? Et comment incarner tout cela dans la chaîne de gestion? » Geneviève Fortier ajoute son grain de sel : « Peu importe qu’ils soient identifiés comme des haut potentiels ou non, tous les employés devraient avoir un plan de développement individualisé. Ce qu’on veut, c’est que leur environnement de travail leur permette de donner le meilleur d’eux-mêmes, de maximiser LEUR potentiel. »

Pour soutenir l’épanouissement de ses employés, McKesson Canada mise sur une variété de pratiques intéressantes : primes pour la recommandation d’employés, programme d’achat d’actions, compensation complémentaire lors de congé de maternité, participation financière à l’accréditation professionnelle, etc. On encourage également l’éducation continue, autant celle des employés que de leurs enfants, grâce notamment à des bourses pouvant aller jusqu’à 1000 $. Car si McKesson Canada valorise l’engagement de ses employés, elle tient à montrer l’exemple, comme l’affirme Domenic Pilla : « Nous sommes engagés à aider les gens à changer leur vie de façon positive par l’entremise de nos activités de responsabilité sociale. C’est pourquoi nous encourageons nos employés à faire des dons et à donner de leur temps à leur collectivité ou à des organismes caritatifs, et nous les appuyons dans leur démarche. Nous sommes très fiers du rôle actif que nous jouons à titre de partenaire au sein des collectivités où nous menons nos activités et où vivent et travaillent nos fournisseurs, nos clients et nos employés, et nous jouons ce rôle de façon responsable. »

Cette cohérence entre les valeurs et le quotidien s’inscrit dans le discours que tient le duo en ce jour d’entrevue. Ce n’est d’ailleurs pas anodin que l’amélioration continue des processus opérationnels (Six Sigma) soit en partie sous la responsabilité de Geneviève Fortier, en co-leadership avec le vice-président, approvisionnement. Selon le président, Six Sigma est l’un des catalyseurs au cœur des plans stratégiques et tactiques de McKesson Canada : « Cette démarche fait partie de notre ADN et elle nous a aidés à créer la meilleure proposition de valeur et à établir le meilleur processus d’exécution dans le secteur des soins de santé au Canada. »

Cette philosophie de gestion, qui vise l’atteinte de l’excellence opérationnelle par l’engagement de l’entreprise toute entière envers des initiatives d’amélioration continue, repose en effet sur des troupes bien motivées à atteindre les objectifs et à évaluer constamment les opportunités d’optimiser la chaîne d’approvisionnement.

Récemment, iSixSigma, chef de file dans le domaine Six Sigma, a nommé McKesson la meilleure entreprise Six Sigma pour laquelle travailler en Amérique du Nord. Sans contredit, cet excellent résultat justifie pleinement l’investissement en ressources humaines d’il y a quelques années. Et, pour la petite histoire, lors de la visite annuelle subséquente au siège social de San Francisco, a-t-on besoin de préciser que Domenic Pilla et Geneviève Fortier étaient fort satisfaits des nouveaux résultats du sondage sur l’engagement? Voilà un exemple convaincant du rôle de premier plan que jouent les ressources humaines dans la progression d’une entreprise.

Pas facile de recruter quand on n’est pas aussi connu que ses clients!
Si la culture de McKesson Canada est vivante et invitante, elle ne jouit cependant pas d’un large rayonnement public. Pour une raison très simple : l’entreprise prodigue ses services à d’autres organisations et non au grand public. C’est donc un défi supplémentaire pour véhiculer sa marque employeur et dénicher des perles rares, celles qui conjuguent un esprit entrepreneurial et innovateur à une rigueur dans les processus…
 
Quelques incontournables pour performer en gestion des ressources humaines, selon Geneviève Fortier, CRHA
  1. Démontrer les résultats de ses actions, en mesurant l’impact généré et pas seulement les activités réalisées – L’analyse des résultats au sondage sur l’engagement des employés a grandement servi à identifier les opportunités et à soutenir avec succès le virage RH entrepris par McKesson en 2007.
  2. Déployer les services partagés tout en maintenant l’équilibre entre la mise en commun des services et la flexibilité requise par les cultures locales – Exploités avec finesse, les services partagés ont un réel effet de levier. Cela dit, on doit garder une flexibilité et une agilité pour s’adapter aux différents environnements dans lesquels on évolue.
  3. Savoir gérer des projets – Les enjeux deviennent de plus en plus complexes et l’opérationnalisation des « bonnes idées » est essentielle. Parfaire sa formation en gestion de projets est fortement recommandé.
  4. Il faut savoir compter! – Geneviève Fortier insiste : « Pour jouer un rôle d’influence au sein de la direction, les responsables des ressources humaines doivent être à l’aise pour parler chiffres, revenus, coûts, investissements, productivité, et savoir présenter le retour sur investissement des projets. » Autrement dit, la stratégie de gestion des ressources humaines doit être en adéquation avec la stratégie globale et l’environnement dans lequel baigne l’entreprise.

Chantal Dauray, journaliste indépendante et présidente de Concerta Communications

Source : Effectif, volume 14, numéro 2, avril/mai 2011.