Vous lisez : Le télétravail : pistes de réflexion lors de la mise en oeuvre

Le télétravail consiste à offrir et à faciliter aux employés l’accès à l’emploi à l’extérieur du milieu traditionnel. Cela peut se traduire par l’exécution du travail à partir du domicile ou dans un bureau satellite situé plus près de la demeure du travailleur.

Dans un contexte où les organisations cherchent à attirer et à retenir la main-d’œuvre et où les employés recherchent des conditions favorables à la conciliation entre les exigences de leur vie professionnelle et celles de leur vie personnelle, la formule du télétravail semble une option intéressante. Selon diverses enquêtes, environ 10% de la population active effectue une partie ou la totalité de ses tâches à domicile sur une base régulière (Statistique Canada, 2007). Cette proportion augmente si l’on considère les travailleurs autonomes, ainsi que les salariés qui ramènent occasionnellement un surplus de travail à la maison.

Présentement, près d’une organisation canadienne sur deux propose la formule du télétravail. Toutefois, avant d’offrir cette option au personnel de votre organisation, il importe, en tant qu’employeur, de se poser certaines questions. Cette chronique vous propose un survol des principaux facteurs à prendre en considération.

Avantages pour l’employé et pour l’employeur 

Le télétravail permet de gagner un temps précieux puisqu’il peut réduire considérablement la durée des déplacements quotidiens ou hebdomadaires. La qualité de vie s’en voit donc accrue, l’employé pouvant ainsi se consacrer à des activités bénéfiques pour une vie mieux équilibrée, telles que l’exercice, le temps avec les enfants ou le bénévolat. La journée de travail productif peut aussi se voir prolongée, puisque l’employé n’a pas, par exemple, à partir plus tôt pour éviter la circulation ou pour ne pas être en retard à la garderie. Cela se traduit aussi par une diminution de l’absentéisme, puisque le travailleur peut aisément ne s’absenter que quelques heures pour des rendez-vous en cours de journée de travail plutôt que de manquer une journée complète. 

En outre, on observe une réduction des dépenses, et ceci, tant pour le travailleur que pour l’employeur. Du côté de l’employé, les coûts reliés à l’essence ou aux titres de transport, aux vêtements et aux repas à l’extérieur seront diminués. Pour un employeur, les économies relèvent surtout des espaces de travail. En effet, le télétravail permet à deux personnes de partager le même bureau ou espace de stationnement, si l’on s’assure que leurs visites ne coïncident pas.

Enjeux de gestion 

Évidemment, une formule comme le télétravail ne peut convenir à tous les types de postes dans une organisation. Il est donc important de déterminer d’abord le nombre et la nature des postes susceptibles d’être propices au télétravail, notamment ceux qui requièrent du travail en solo et qui nécessitent une bonne dose de concentration. Une implication du syndicat, s’il y a lieu, et un travail de communication soigné sont essentiels au succès de la mise en œuvre de cette pratique, et ce, de façon à éviter les perceptions d’iniquité. En ce sens, d’autres types d’avantages ou de formes de flexibilité pourraient être offerts à ceux dont le poste ne permet pas le télétravail. Par la suite, il est pertinent d’effectuer une évaluation de la personnalité de l’employé qui souhaite faire du télétravail. Est-il suffisamment autonome, discipliné, capable de fonctionner avec des contacts interpersonnels réduits? Si oui, il est suggéré de convenir avec les employés qui en font la demande de procéder à un essai pilote sur une base temporaire (de 3 à 6 mois). Le télétravail à temps partiel (de 1 à 3 journées par semaine) est aussi celui qui semble le plus efficace, car il permet à l’employé de rester en contact avec son milieu de travail et de maintenir son sentiment d’appartenance à l’équipe.   

Sur le plan de la gestion, par ailleurs, il est difficile de contrôler le nombre d’heures réelles passées à travailler. Les gestionnaires doivent donc être prêts à faire confiance à leurs employés quant à la gestion de leur horaire et à leur intégrité professionnelle. Ils doivent en outre procéder par fixation d’objectifs et réaliser l’évaluation de la performance en fonction des résultats atteints. Une bonne formation des gestionnaires peut s’avérer très utile en ce sens, surtout si un changement de culture accompagne ces façons de faire.

Enjeux législatifs 

Deux éléments légaux retiennent l’attention en matière de télétravail. Tout d’abord, l’aspect de la sécurité et de la confidentialité des données. Pour garantir le succès du travail à domicile, il est recommandé d’équiper l’employé de divers outils technologiques lui octroyant l’accès aux documents de travail et facilitant la transmission de l’information avec ses collègues (portable, connexion Internet, webcam, télécopieur, etc.). Toutefois, le matériel de nature délicate se doit d’être protégé des regards indiscrets. Il convient donc de voir à la mise en place de mots de passe, voire de s’assurer que l’écran d’ordinateur de l’employé ne soit pas visible par une fenêtre de l’extérieur de sa demeure. La prudence est de mise. La question des assurances doit aussi faire l’objet d’une entente écrite. Si l’équipement de l’entreprise est volé au domicile de l’employé, qui paiera la prime?

En second lieu, nous ne pouvons passer sous silence la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, puisqu’elle s’applique aux télétravailleurs. En effet, il est de la responsabilité de l’employeur de s’assurer que le lieu de travail de l’employé est sain et sécuritaire, notamment sur les plans de l’espace et de l’ergonomie. D’autre part, le travailleur est responsable de déclarer toute blessure ou maladie occasionnée par l’exercice de son travail, car celles-ci sont considérées comme des lésions professionnelles. Encore une fois, étant donné l’absence de témoins potentiels, la notion de confiance revêt une importance particulière entre l’employé et l’employeur.

Pour conclure, les avantages du télétravail sont nombreux. Si la pratique est bien mise en oeuvre, en plus des avantages cités plus haut, l’entreprise pourra démontrer une baisse significative des déplacements de ses employés, ce qui n’entraîne que des effets bénéfiques sur l’environnement. Il s’agit d’une contribution considérable à la diminution de l’émission des gaz à effet de serre, que toute bonne organisation se doit de viser.

Principes à retenir pour les gestionnaires :

  • Donner des objectifs clairs et mesurables aux télétravailleurs et les évaluer en fonction des résultats obtenus;
  • Maintenir un contact régulier avec les télétravailleurs, par téléphone ou par courriel, de façon à faire des suivis et à offrir un soutien si nécessaire;
  • Ne jamais oublier d’inviter les télétravailleurs aux réunions d’équipe et aux activités sociales;
  • Faire confiance aux télétravailleurs.

Principes à retenir pour les professionnels de la gestion des ressources humaines :

  • Doter l’organisation de critères précis pour l’admissibilité au télétravail de certains postes (nature des tâches, outils technologiques, etc.) et de certains individus (bonne connaissance de l’entreprise et de ses responsabilités, autonomie, discipline, fiabilité, etc.);
  • Offrir un soutien aux télétravailleurs et s’assurer de répondre à leurs besoins divers;
  • Former et accompagner les gestionnaires qui ont plus de difficulté à procéder à la supervision virtuelle et à la gestion par objectifs.

Pour pousser la réflexion plus loin sur ce thème, voici une suggestion de lecture pertinente : Gottlieb, B.H., Kelloway, E.K. et Barham, E. (1998). Flexible Work Arrangements, Wiley, 187 pages.

Guylaine Deschênes, Ph.D., CRHA, est psychologue organisationnelle et consultante en GRH et DO chez GD Ressources. On peut la rejoindre au 514 827-1523 et au gdeschenes@gdressources.com.

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