Vous lisez : Travailleurs étrangers temporaires au Canada : la conformité des employeurs

Ce texte a été mis à jour en mai 2024.

Au Québec, de nombreuses entreprises font appel à des travailleuses et à des travailleurs étrangers qu’elles embauchent sur une base temporaire. Leur venue découle souvent de mutations de personnel, d’ententes internationales, d’une rareté de la main d’œuvre dans certains secteurs d’activité ou encore du besoin d’embaucher du personnel qualifié pour faire face à la concurrence mondiale.

En général, un permis de travail est délivré sur la base d’une offre d’emploi particulière faite par un employeur canadien (ou ayant des activités au Canada). Il s’engage ainsi à fournir à cette personne un salaire, des conditions de travail et un emploi similaires aux conditions décrites dans la demande d’Étude de l’impact sur le marché du travail (EIMT) soumise à Service Canada. Dans l’éventualité où l’emploi est dispensé d’une EIMT (par exemple : mutation au sein d’une entreprise, professionnelle ou professionnel de l’ACEUM, etc.), l’employeur s’engage à fournir à la personne venue de l’étranger un salaire, des conditions de travail et un emploi similaires aux conditions décrites dans l’offre d’emploi soumise sur le Portail de l’employeur d’Immigration Canada (le « Portail »). Il est à noter qu’un contrat d'emploi doit être signé par l’employeur et le travailleur ou la travailleuse avant la soumission de l’offre sur le Portail. Ce contrat devra décrire les mêmes conditions d’emploi que celles soumises dans l'offre. Cette obligation est prévue par Règlement.

En vertu de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés et de son Règlement afférent, Service Canada et Immigration Canada peuvent examiner les activités des entreprises afin de vérifier l’exactitude des informations fournies dans le cadre des demandes de permis de travail. L’objectif est de s’assurer que les employeurs ont respecté en tout temps les conditions définies dans leurs offres. Ces vérifications peuvent se faire par une inspection de l’entreprise, une entrevue (notamment avec la travailleuse ou le travailleur étranger) et une demande à l’employeur de fournir des documents et des renseignements. Ces enquêtes peuvent être déclenchées de façon aléatoire, au moment d’un constat d’infraction, d’une dénonciation ou d’une nouvelle demande d’EIMT. Cette dernière peut alors être suspendue pendant l’enquête, et son approbation devient conditionnelle au résultat.

L’employeur devra alors démontrer que les travailleuses et les travailleurs étrangers ont été embauchés dans la même profession, de même qu’ils ont reçu des salaires et bénéficié de conditions de travail qui sont essentiellement les mêmes, mais non moins avantageux que ceux décrits dans l’offre d’emploi.

Nouvelles exigences entrées en vigueur en 2022

Le 26 septembre 2022, le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, a subit des modifications pour renforcer la protection des travailleurs étrangers en établissant de nouvelles exigences et conditions à respecter pour les employeurs et en augmentant la capacité des autorités d’immigration à tenir les employeurs responsables en cas de non-conformité. Les nouvelles obligations prévoient notamment :

  • le paiement pour une assurance-maladie privée couvrant les soins médicaux d’urgence du travailleur étranger pendant la période précédant l’admissibilité au régime d’assurance-maladie publique provincial ou territorial lorsque le permis de travail est issu d’une EIMT;
  • fournir aux travailleurs étrangers les renseignements les plus récents sur leurs droits au Canada, au plus tard lors de leur premier jour de travail et de les mettre à la disposition des travailleurs étrangers tout au long de leur période d’emploi au Canada;
  • le pouvoir d’Immigration Canada ou Service Canada d’exiger que des tiers, comme des banques et des entreprises chargées de l’administration de la paie, leur fournissent des documents afin de vérifier que l’employeur respecte les conditions d’emploi soumises dans leur demande d’EIMT ou dans l’offre d’emploi sur le Portail.

Sanctions

Les employeurs qui ne se conforment pas à cette règle s’exposent à différentes sanctions. Elles sont déterminées selon le type d’employeur et les antécédents en matière de conformité ainsi que la nature et la gravité de l’infraction. Les sanctions peuvent aller d’un simple avertissement à un bannissement (un à dix ans, voire permanent en cas de violation grave), interdisant à l’employeur de participer aux programmes d’immigration temporaire. L’employeur s’expose également à des sanctions pécuniaires variant de 500 $ à 100 000 $ par violation, pouvant totaliser jusqu’à un million de dollars par année. Enfin, Immigration Canada pourrait refuser de nouvelles demandes de permis de travail présentées par l’employeur et révoquer des permis de travail déjà émis.

Recommandations

Avant le dépôt d’une offre d’emploi sur le Portail ou d’une demande d’EIMT, il est important de consulter les parties prenantes (travailleuse ou travailleur, superviseuse ou superviseur, direction, ressources humaines) afin de déclarer précisément les conditions réelles de l’emploi offert. Il est également important d’anticiper, au besoin, les modifications susceptibles d’être apportées aux conditions d’emploi pendant la période de validité du permis de travail pour les mentionner dans l’offre. Par exemple, celles-ci peuvent inclure les augmentations de salaire annuelles, les primes et les lieux de travail. L’employeur doit aussi s’assurer de proposer des conditions conformes aux exigences du programme d’immigration utilisé ainsi qu’aux lois fédérales, provinciales et territoriales sur l’emploi et le recrutement.

Immédiatement après la délivrance du permis de travail, il est important de communiquer les conditions d’emploi déclarées à Immigration Canada et les obligations de conformité de l’employeur aux différentes personnes responsables du poste au sein de l’entreprise (chef d’équipe, gestionnaire, ressources humaines, etc.). Cette étape permettra d’éviter que des modifications auxdites conditions soient faites, lesquelles pourraient rendre l’entreprise non conforme.

Durant la période de validité du permis de travail, toute modification envisagée aux conditions d’emploi de la personne étrangère doit être évaluée et, au besoin, les démarches nécessaires doivent être effectuées avant de mettre en œuvre ce changement. Il faudra ainsi obtenir un nouveau permis de travail avant de mettre en place un changement considérable de salaire, de lieu de travail, de profession ou de responsabilités (y compris une promotion) modifiant la classification du poste selon la Classification nationale des professions (CNP), mais aussi, avant de modifier des conditions touchant les heures de travail, les prestations, les indemnités et les autres avantages.

Il est à noter que les employeurs peuvent faire l’objet d’examens de conformité ou d’inspections à tout moment au cours des six années suivant le début de l’emploi d’une travailleuse étrangère ou d’un travailleur étranger temporaire au Canada. Pendant cette période, les parties doivent conserver toute la documentation relative à la demande.

Conclusion

Les règlements régissant les demandes de permis de travail offrent un cadre très rigide aux employeurs qui embauchent des travailleuses et des travailleurs étrangers temporaires au Canada. Les employeurs doivent être particulièrement vigilants quant aux conditions de travail qu’ils décrivent dans les demandes de permis de travail et qu’ils appliquent tout au long de la durée des permis.

Plus que jamais, recourir à l’avis d’une experte ou d’un expert en immigration au moment de la préparation et du dépôt d’offres d’emploi, de demandes d’EIMT et de permis de travail peut s’avérer judicieux afin de s’assurer de répondre aux diverses exigences des programmes, et tout particulièrement de la conformité des employeurs.

Source : VigieRT, mai 2017.
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